Première école publique

 

Ploemeur opposée à la création d'une école à Larmor

Le 11 Août 1861, Louis de Raime, maire de Plœmeur depuis 1852, donne lecture au conseil municipal d'une lettre du sous-préfet de Lorient soulignant que la commune de Plœmeur n'a pas encore d'école de filles, de sorte que les familles indigentes sont privées du bienfait de l'instruction primaire.
La commune, allouant à l'une des institutions libres une subvention, précise que l'instruction des filles lui parait encore largement assurée par les huit écoles, dont une au Kernével et une à Larmor. Il est vrai qu'on n'y reçoit guère que des élèves payantes. Le plus économique est d'allouer une subvention à une institutrice libre.
A l'unanimité le conseil refuse l'ouverture d'une autre école.

Cinq ans plus tard la circulaire du 20 août 1866 relative au certificat d'études primaires publiée par Victor Duruy, ministre de l'instruction publique, précise que l'examen ne sera pas obligatoire, l'instituteur n'appellera à y prendre part que les élèves qui en manifesteront le désir. En 1867 il crée les "écoles de hameau", et invite les communes à en assurer la gratuité.

Les écoles de filles fortement conseillées depuis 1850 peuvent maintenant être ouvertes dans les communes de 500 habitants seulement. Plœmeur possède deux écoles privées au bourg.
A cette époque, l'enseignement primaire, garçons ou filles est prodigué par deux types d'établissements : les écoles communales et les écoles libres, chacune ayant des enseignants laïcs ou congréganistes. Les enseignants du public peuvent être des religieux, la religion faisant encore partie des programmes.

En 1867, suite à une demande du préfet, le maire répond que l'instruction primaire est suffisamment assurée à Larmor, quartier "peu populaire" de 275 habitants. Pourtant les enfants du hameau de Larmor doivent parcourir par tous les temps jusqu'à 5 à 6 kilomètres à pieds pour se rendre à l'école du bourg de Plœmeur et autant pour revenir.

Le conseil départemental de l'enseignement primaire soumet à la municipalité de Plœmeur l'idée de la création d'une école de hameau à Larmor, faisant remarquer qu'il existe à Larmor une école libre de filles qui pourrait être déclarée "communale".

Le maire estime que la création d'une école de hameau à Larmor n'est pas nécessaire. Il n'existe à Larmor aucun local propre à l'établissement projeté et la commune serait obligée de bâtir à son compte. A plusieurs reprises des instituteurs sont allés s'y fixer mais ils n'ont pu s'y maintenir par suite du petit nombre d'enfants fréquentant l'école.
En ce qui concerne une école de filles, le conseil est unanime, il n'y a pas lieu de prévoir de création pour Larmor.
En fait, une école à Larmor attirerait nombre d'écoliers et nuirait au bourg de Plœmeur.

 

Enfin une école publique à Larmor

Un nouveau maire, Joseph Marie Lucos, étant élu le 1er septembre 1870, la population de Larmor en profite pour faire des pétitions revendiquant l'ouverture d'une école.

L'année suivante, M. de Bernadière, adjoint-délégué, donne lecture des pétitions qui lui ont été adressées par les habitants de Larmor, pour obtenir une école de garçons. MM. Le Gall et de Raime appuient cette pétition. Le maire précise alors que l'école ne pourra entrer en exercice avant l'année prochaine, les loyers ne commençant qu'à partir du 1er mars ou du 1er septembre.
Après délibération, le conseil émet le vœu que l'école de Larmor soit créée aussitôt que cela sera possible.

En 1872, la partie agglomérée du village de Larmor compte 32 maisons occupées par 59 ménages soit 247 individus. Par contre si l'on considère la "section" de Larmor, incluant son environnement immédiat, Locqueltas, Kerderff, Le Ménez, Kerblaisy, il y a 170 ménages comptant 659 personnes et 116 maisons.

 

Le 8 février 1872, le maire donne connaissance d'une lettre du sous-préfet informant d'un avis favorable du conseil départemental de l'instruction publique relativement à la création de l'école de Larmor et à la location des locaux.

Les locaux trouvés sont très proches de l'église, à 10 mètres seulement selon les plans annexés au bail à loyer de 3, 6, 9 ans, prenant effet le 1er mars 1872.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le bail du 7 février précise que madame Marie Antoinette Quesnel, veuve de monsieur Claude Bastien met à disposition de la commune de Plœmeur une maison comprenant :
- au rez-de-chaussée : 3 chambres ;
- au 1er étage : 2 chambres et cabinet (de toilette, sur le palier),
- grenier au-dessus dont elle se réserve la moitié ;
- cave sous la moitié nord de la maison ;
- cour à l'est avec lieux d'aisance.
Le loyer annuel est fixé à 380 francs.

Cette construction couvre 89 m2 au sol et une cour occupe approximativement 100 m2.

Larmor possède enfin son école, publique et gratuite. Les enfants peuvent y être accueillis à partir de l'âge de 7 ans.

Le rez-de-chaussée est transformé en une seule pièce tout en conservant l'escalier d'accès au 1er étage. S'il était nécessaire, plus tard, de créer deux classes, on pourra rétablir les cloisons d'origine.

 

Le premier instituteur de cette école de garçons est monsieur Olivier Le Guillou, 21 ans, adjoint à Plœmeur, muté à dater du 18 avril 1872, avec un salaire annuel de 600 F.
Pour sa première année, l'école accueille 100 élèves, dont 2 payants.

 

A la même époque, la municipalité accorde 100 F de subvention à une demoiselle Conquer, institutrice à Larmor, qui favorise la propagation de l'enseignement primaire, compte tenu du nombre reconnu d'élèves indigents reçus par elle. Une classe privée existait donc à Larmor avant l'ouverture de l'école communale.

 

Le 10 août une importante décision du conseil municipal concerne l'école de Larmor :
1°) les enfants admis à titre gratuit ou payant devront avoir atteint l'âge de 7 ans ;
2°) le produit de la rétribution scolaire sera alloué aux instituteurs qui le demandent ;
3°) les jeunes filles admises à titre indigent chez les institutrices subventionnées devront avoir 7 ans accomplis. Les institutrices pourront en dehors de ces vingt élèves que leur imposent les conventions passées avec l'administration municipale, prendre dans leurs écoles des enfants en bas âge, mais sous leur propre responsabilité.

 

L'école de hameau pour garçons fonctionne à Larmor et les premiers frais arrivent. En 1873, le maire demande un crédit de 107 francs pour l'achat de cartes de géographie et tableau pour l'école.
Des réparations s'élèvent à 59,75 F à régler à madame veuve Calvar
                                 4 journées de maçon à 3 f. la journée     14 F. (!)
                                 un demi sac de chaux hydraulique            2,25
                                 un demi hectolitre chaux grasse                1,50
                                 un tableau en bois du nord peint               9,00
                                 repeint un vieux tableau                            3,00
                                 fourni un bureau                                      30,00

Le maire fait connaitre les noms des 12 élèves indigentes admises gratuitement chez l'institutrice de Larmor, et propose une allocation de 1200 francs pour mademoiselle Mignon institutrice privée en espérant qu'elle pourra admettre 20 élèves.

 

En 1878, cinq ans après la création de l'école de Larmor, le rapport de la commission des écoles précise : Cette école ne mérite pas les éloges……les élèves (garçons) ne sont pas disciplinés. Leur nombre qui était de 56 le jour de notre visite peut s'élever, d'après le registre de l'instituteur, jusqu'à 72. Il nous a parlé d'un sous-maître, mais il n'y a nullement lieu à donner suite à cette demande, le nombre des enfants étant inférieur à celui indiqué par la loi pour avoir droit à un adjoint.
Quant à l'école libre des filles tenue par mademoiselle Mignon, elle renfermait une vingtaine d'enfants le jour de notre visite. Ce nombre s'élève à 30 ou 35 enfants en été. Rien ne viendrait donc justifier les prétentions de la titulaire de cette école à devenir institutrice communale.

 

Projet de création d'un groupe scolaire

Le 17 octobre 1878 le conseil municipal envisage enfin la création d'un groupe scolaire. La commune de Plœmeur compte trois groupes scolaires :
1°) celui du bourg, 2°) celui de Larmor, 3°) celui de Keryado……
Le grand nombre d'élèves montre l'insuffisance des locaux dans lesquels ces écoles sont installées. Un seul est propriété de la commune et en mauvais état. Ceux de Larmor sont installés dans une maison louée par la commune, insuffisants tant au point de vue de la surface que de l'hygiène……
Le conseil décide :
- la construction de deux groupes scolaires, dont l'un situé à Larmor pour 150 à 180 élèves avec bâtiments annexes pour l'instituteur et l'adjoint ;
- une demande de subvention au ministère de l'instruction publique et au département ;
- un emprunt pour construction d'école dont l'intérêt et l'amortissement seront payés tous les six mois à l'aide des sommes employées pour la location des écoles actuelles ;
- dès le début de l'année scolaire de 1880, l'école congréganiste de Plœmeur ne touchera plus l'allocation de mille francs que la commune lui donnait pour recevoir les enfants indigents.

Monsieur Mathieu fait une proposition relative aux plans, devis, etc. J'offre à la commune de me charger gratuitement de l'étude des projets et de les préparer conformément aux usages ministériels. J'offre de me charger de la direction des travaux, après adjudication publique.

Un an plus tard, M. Mathieu expose au conseil qu'au bourg, l'école communale n'est fréquentée que par 60 à 80 élèves au plus, tandis que l'école de Larmor en reçoit 110. Le conseil arrête qu'il y a lieu de demander à monsieur le préfet de prier le conseil académique de décider que ces écoles soient transformées en écoles communales.

 

Elèves à l'école de garçons de Larmor en 1879
Le 30 novembre, sur la liste dressée par l'instituteur Jouanno, on dénombre 66 élèves dont l'âge varie entre 5 et 16 ans, soit :
7 de 5 à 6 ans, 32 de 7 à 9 ans, 25 de 11 à 13 ans, 2 de 15 et 16 ans.
Ils viennent de familles aux activités très diverses : journalier, cultivateur, pêcheur, tonnelier, boulanger, jardinier, boîtier, facteur, maçon, menuisier, cabaretier, fabriquant de conserves, etc.

 

Achat du terrain
En 1879 le groupe scolaire est toujours à l'étude. La commission des écoles composée de messieurs Chaine, Mathieu et Carnoy propose un terrain situé au Ménez près Larmor (en fait ce terrain est situé à l'emplacement de l'actuelle médiathèque) qui semble remplir les conditions voulues pour l'école. On espère avoir le terrain à 0,60 F le mètre.

Le terrain de Jean Michel Scanvic au village du Ménez n'est pas suffisant pour bâtir un groupe scolaire à Larmor et il est nécessaire de faire l'acquisition d'une parcelle de terre voisine appartenant à la veuve Guillerme qui s'y oppose.
Par contre madame veuve Le Bris consent à en céder une, au prix de 3 F le mètre, ce qui est accepté par le conseil.
Le maire met aux voix l'acquisition du terrain Scanvic Jean, que celui-ci s'est engagé à céder à la commune à raison de 2 F le mètre carré. Acquisition décidée.

Ce n'est que le 19 avril 1882 que M. Scanvic signe l'acte sous seing privé de cession d'un terrain de 19 ares et 39 centiares, situé en bordure de la route de Larmor à Lorient pour construction d'école.

Le 12 juillet le conseil municipal charge monsieur le maire de faire faire un plan de l'école à construire sur le terrain acheté au sieur Scanvic.

Le 24 juin 1883 le conseil municipal approuve un projet de construction de groupe scolaire à Larmor conçu par l'architecte Kergrohen, et l'adresse au préfet du Morbihan.
Il s'agit de construire une école de garçons et une école de filles ainsi que les logements pour les enseignants, le tout évalué à 544 746 F sans compter le terrain nécessaire évalué approximativement à 4000 F.

 

La grande réforme de Jules Ferry et ses répercussions.
Jusqu'en 1879 les ministres s'efforcent de maintenir l'équilibre, tout en mécontentant les partis Radical et Républicain.
Quand Jules Ferry devient ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, de 1879 à 1883, ses actions concernent principalement :
- la laïcité, la formation des instituteurs et des institutrices avec la création d'Ecoles Normales dans chaque département ;
- l'éducation des filles en les ramenant dans le public tout en éliminant les religieux qui y enseignent ;
- la gratuité de l'école primaire rendue obligatoire de 6 à 13 ans.

La loi Jules Ferry du 28 mars 1882 stipule que l'instruction primaire est obligatoire et gratuite de six ans à treize ans révolus ; elle peut être donnée, soit dans les écoles publiques ou libres, soit dans les familles. Elle supprime tout enseignement confessionnel dans les écoles publiques.
Le certificat d'études primaires sera décerné après un examen public à partir de l'âge de 11 ans. En cas de réussite avant cet âge, l'enfant ne sera pas obligé de rester à l'école primaire jusqu'à 13 ans.
Les principales matières concernent : lecture et écriture – langue et littérature française – géographie et histoire de France – instruction civique et morale – éléments de sciences naturelles, physiques et mathématiques –travaux manuels et usage des outils des principaux métiers – éléments de modelage, du dessin et de la musique –gymnastique et exercices militaires pour les garçons et travaux à l'aiguille pour les filles – notions usuelles de droit et économie politique.

 

Depuis toujours la langue bretonne est utilisée dans les écoles, ne devenant un auxiliaire que pour l'apprentissage du français. Elle est toujours employée pour apprendre le catéchisme.
Puis l'enseignement se fait en français puisqu'il est interdit aux maîtres de recourir à un seul mot de breton. En répression de l'usage de cette langue officiellement proscrite, répondent des méthodes dégradantes telles que le port du "symbole" ou "sabot" qu'on attache au cou des élèves ayant parlé breton à l'école.

 

Renouvellement du bail de l'école de Larmor
Ne pouvant attendre la construction du futur groupe scolaire, la seule possibilité pour les garçons est de reconduire le bail de la maison Bastien qui arrive à échéance.
Mais cela ne règle pas le cas des filles.

 

Ouverture d'une deuxième classe
En 1884, l'instituteur de Larmor demande à ce qu'il lui soit accordé un adjoint, le nombre de ses élèves ayant dépassé cent. Il lui est impossible de pouvoir s'occuper de tous les enfants. Il fait valoir qu'en remontant les cloisons qui existaient autrefois, il est très facile d'organiser deux classes. Le conseil approuve la création de ce poste d'adjoint.

L'inspecteur primaire souligne qu'à Larmor on compte 100 garçons de 5 à 13 ans dont 87 à l'école actuelle installée dans une maison louée. Au rez-de-chaussée il y a une seule classe de 63,88 m², mais en remontant les cloisons qui existaient auparavant on pourrait avoir une classe de 34,50 m² et une autre de 19,88 m². Il serait facile de trouver un logement pour l'instituteur-adjoint, si l'instituteur qui est célibataire ne consentait pas à céder une de ses chambres. En conséquence, il émet un avis favorable à la création d'un poste d'adjoint.

En 1886, le recensement nous confirme la présence d'un adjoint, puisque 3 enseignants figurent à Larmor :
                                             Mademoiselle Theauden, 36 ans (déjà recensée en 1881).
                                             Regent Elie Marie, 48 ans
                                             Royan Antoine, 27 ans
Il y a donc maintenant deux classes à l'école des garçons.

De son côté, Monsieur Scanvic demande une indemnité pour son terrain qui a été choisi pour la construction de l'école de Larmor et qu'il a laissé sans culture depuis deux ans. Il réclame l'intérêt du prix, c'est-à-dire 460 F pour deux années.