La cale du Kernével
Le 22 mars 1850, M. Auguste Gillet, propriétaire de l'usine à sardines du Kernével demande l'autorisation de construire une cale de débarquement en face de son établissement sur une partie du rivage de la mer. Son projet est soumis à enquête et à l'examen des administrations concernées.
Le 17 août 1850, le préfet maritime fait observer que si la cale projetée devait s'étendre jusqu'à la laisse des plus basses mers d'équinoxe, elle réduirait considérablement le chenal qui est déjà étroit entre le banc du Turc et la plage de Kernével et deviendrait un obstacle au louvoyage des caboteurs. Il propose de limiter la cale à la laisse des basses mers en mortes eaux.
Le 2 septembre le directeur des douanes donne son accord, suivi le 17 octobre par celui du ministre de la guerre.
Le 5 avril 1851, le directeur des domaines, suivant l'avis des ingénieurs, est partisan d'imposer les conditions suivantes :
1° la cale sera construite vis-à-vis de l'entrée principale de l'établissement du concessionnaire et perpendiculairement à la façade de sa maison d'habitation.
2° cette cale dont l'origine sera placée à six mètres de l'entrée susmentionnée et son accès demeurera réservé à toutes les embarcations qui n'auront à prendre ou à déposer à terre que des passagers et des marchandises, à la charge par ceux qui s'en serviront de réparer les dégradations provoquées de leur fait.
3° si pour les besoins d'un service public il devenait nécessaire de reprendre le terrain sur lequel la cale sera construite, ou de détruire cette dernière, le Sr Gillet sera tenu de remettre les lieux dans leur état primitif.
Bien que la cale aura le caractère d'un ouvrage d'utilité publique, la concession ne peut pas être faite gratuitement et une redevance annuelle de 2 francs est fixée.
Par arrêté préfectoral du 19 avril 1851 Auguste Gillet, fabricant de conserves alimentaires, est autorisé à construire une cale de débarquement près de son usine aux conditions ci-dessus.
Le 16 mai, le ministre des finances approuve cet arrêté, mais sous réserve qu'un bail soit établi pour 9 années, conformément à la législation qui s'oppose à ce que l'amodiation d'un bien de l'Etat soit consentie pour une durée plus longue.
Un bail est préparé, mais M. Gillet fait remarquer qu'il n'a jamais demandé à passer un bail pour le terrain en question dont il se prétend propriétaire, mais seulement l'autorisation d'y construire une cale. Il justifie ses droits sur ce terrain en particulier par un arrêt du conseil du 18 janvier 1785.
L'administration reconnait le fait et le 10 décembre 1851, le préfet rapporte son précédent arrêté et autorise M. Gillet, à construire une cale sur un terrain lui appartenant.
Le 6 mai 1852, les ponts et chaussées procèdent à l'abornement des terrains domaniaux cédés par l'arrêt de 1785. Le procès-verbal de délimitation est approuvé par le préfet le 30 août.
Le 6 novembre 1880, Jules Laureau fabricant d'engrais et des habitants du Kernével et de Larmor adressent une pétition au préfet. Ils exposent que la cale de débarquement du Kernével, servant aux pêcheurs et aux industriels pour l'embarquement et le déchargement de leurs marchandises se trouve dans un état de délabrement tel que sa ruine prochaine est à craindre. Ils demandent qu'elle soir réparée dans les plus brefs délais.
Cette cale n'appartient pas à l'état mais à monsieur Ouizille qui en a donc la charge. Or il vient de déclarer qu'il abandonne gratuitement à l'état son droit de propriété.
Le conducteur des Ponts et chaussées, Boudvilain, est saisi de cette affaire. Il réalise une étude sur l'activité au Kernével.
Les renseignements fournis par la douane témoignent de la navigation au Kernével.
Bateaux en relache 20 environ
en réparation 10
rentrés au port 278
sortis du port 277
inscrits au port 38
En outre, de nombreux bateaux inscrits à Port-Louis, Locmalo, Gâvres, Riantec et Locmiquélic, fréquentent le Kernével.
Il existe trois usines : deux de conserves alimentaires et une d'engrais animaux.
- L'usine Pereire possède 12 bateaux et 13 autres venant de l'extérieur y sont abonnés. En 1880, elle a fabriqué 3680 caisses.
- L'usine Ouizille et Cie a 30 bateaux qui travaillent pour son compte. Elle a fabriqué 2500 caisses en 1880.
En moyenne, pour les 3 dernières années : usine Pereire 6900 caisses
usine Ouizille 5758 caisses
- L'usine d'engrais de monsieur Laureau occupe 12 hommes pendant toute l'année et a une production de 600 tonnes. Elle possède 2 caboteurs, l'un de 35 tonneaux et l'autre de 10.
Enfin, un bac relie Kernével à Port-Louis pour le transport des personnes, du bétail et des marchandises.
Compte tenu de l'intérêt général qui s'attache au Kernével, le conducteur pense qu'il y a lieu d'accueillir favorablement la demande des pétitionnaires et d'accepter l'offre du propriétaire d'abandonner ses droits.
Les réparations à effectuer sont évaluées à 4000 F.
Mais pour que la cession se fasse, l'administration veut que M. Ouizille cède également la portion de terrain situé à proximité de la cale qui constitue sa dépendance naturelle et nécessaire pour son utilisation.
Mais le 30 mai 1881, la famille Ouizille refuse d'abandonner cette partie de terrain et retire son offre de cession. Elle va donc faire les réparations de la cale à ses frais.
Prolongement de la cale
Le 3 octobre 1900, le conseil d'arrondissement de Lorient émet le vœu que la cale du Kernével soit reconstruite.
Après une visite minutieuse de l'ouvrage, les ponts et chaussées estiment qu'il n'est pas nécessaire de le reconstruire, mais seulement de procéder le plus tôt possible aux réparations les plus urgentes.
Le 17 mars 1901, le conseil municipal de Plœmeur est saisi de nombreuses réclamations concernant la cale du Kernével. Depuis une transaction le 11 juin 1901 entre l'état et la famille Ouizille, celle-ci a renoncé à ses droits et l'administration a pris l'engagement de reconstruire ou mettre en état la digue actuelle avec terreplein devant et au nord de la cabane des douanes.
Mais la cale resterait inaccessible à marée basse, aussi le conseil émet le vœu que la cale soit prolongée suffisamment pour permettre l'accès des chaloupes de pêche aux plus basses mers.
Le 6 septembre, le conducteur des ponts et chaussées, Després, rédige un rapport sur le port du Kernével.
La cale actuelle a 7,60 m de largeur et présente en élévation deux paliers de 30,30 m et 3,80 m de longueur reliés par un plan incliné de 13,30 m dont les deux extrémités sont établies aux altitudes de (5.95) et (3.04).
En 1900, le port a été fréquenté par :
- 34 caboteurs d'un tonnage moyen de 24 tonnes et de 4 à 5 hommes d'équipage,
- 120 bateaux de pêche ou extracteurs de matériaux sur le littoral, tonnage moyen de 9 tonnes et de 3 hommes d'équipage,
- en été pendant 6 mois environ que dure la période de la pêche à la sardine, journellement 25 bateaux de pêche de 10 tonnes et 7 hommes d'équipage,
- en hiver, journellement aussi, 20 bateaux de 5 à 6 tonnes et de 3 à 4 hommes,
- enfin par un bateau faisant le service des passagers entre Port-Louis et Kernével qui a fait 3454 voyages et transporté 11 600 personnes.
Le demande de Plœmeur d'avoir au Kernével une cale accostable quel que soit l'heure de la marée est bien justifiée.
Un projet est élaboré qui comprend le prolongement de l'ouvrage existant de 12 m et l'adoucissement de la pente du plan incliné reliant les deux paliers. Le coût des travaux est estimé à environ 7000 F dont le tiers soit 2300 F pourraient être demandés à la commune.
Le 13 décembre, le ministère des travaux publics donne son accord à ce projet, mais fixe la part de la commune à 3500 F et demande qu'il soit soumis à l'examen d'une commission nautique puis fasse l'objet d'une instruction mixte.
Le 2 février 1902, le conseil municipal est appelé à se prononcer sur la somme mise à la charge de la commune. Le maire fait remarquer que la dépense demandée est de première nécessité, mais d'un autre côté l'administration doit prendre en considération le vote de 3700 F pour le débarcadère de Larmor et les nombreux sacrifices consentis pour tous les travaux maritimes, enfin la situation faite à une commune rurale par l'érection de la section de Keryado en commune distincte.
En conséquence, le conseil vote une subvention de 2350 F pour la reconstruction de la cale du Kernével et va intervenir auprès du député de Lorient et du conseiller général.
Le conseil général, sollicité pour parfaire la somme demandée à la commune, vote une subvention de 1150 F.
La commission nautique désignée par le préfet se réunit le 7 juin 1902 sur le port de Kernével. Elle est composée de :
- Le Montagner, syndic des gens de mer à Larmor, Président, désigné par le vice-amiral Bienaimé, préfet maritime du 3e arrondissement,
- Bouguénec Isidore, patron pêcheur à Kernével,
- Istin Joseph, patron pêcheur à Kernével,
- Bourhis Jean Marie, patron pêcheur à Kernével,
- Danic Joseph, patron pêcheur à Kernével,
- Gabellec Clément, patron de chalutier à Kernével,
- Guillerme, armateur et négociant à Kernével.
Après avoir pris connaissance du plan et entendu l'ingénieur des ponts et chaussées, la commission, à l'unanimité, émet l'avis que ce projet est d'une grande utilité. Toutefois, elle demande que la partie de la cale en élévation sur le plan de 30,30 m reste intacte comme par le passé pour préserver les embarcations mouillées ou amarrées de l'autre côté nord lors du gros temps avec vents sud et aussi pour le déchargement des marchandises lors des hautes marées. Ensuite le plan incliné viendrait aboutir à son extrémité.
Un nouveau plan est dessiné pour tenir compte de ces modifications.
Le 12 novembre le projet définitif comportant plan, devis et cahier des charge est prêt à être soumis au ministère qui l'approuve le 8 janvier 1903.
La mise en adjudication des travaux a lieu le 14 mars, en même temps que celle du débarcadère de Larmor. 7 concurrents ont fait des offres variant de 5 % d'augmentation à 7 % de rabais. Monsieur Frédéric Borgat, entrepreneur à Lorient est déclaré adjudicataire pour la somme de 5517,37 F.
La réception provisoire des travaux a lieu le 7 décembre 1903.
Demande d'une chaine d'amarrage
En janvier 1921 les marins pêcheurs de Plœmeur adressent une pétition à monsieur Verrière, ingénieur en chef des ponts et chaussées. Ils exposent qu'au Kernével ils n'ont ni corps-morts, ni chaine pour l'amarrage des bateaux. Etant mouillés sur leur ancre, la moindre saute de vent provoque des avaries. Il suffirait de placer une chaine le long du mur de messieurs Galice et Ouizille qui sont d'accord. Ainsi, nous pourrions mouiller nos bateaux à l'arrière avec nos chaines et ancres et à l'avant, amarrer sur cette chaine.
Le conseil municipal, saisi de cette pétition, émet le vœu que satisfaction leur soit donnée.
Le 19 février, l'ingénieur en chef prend les dispositions nécessaires pour procéder à l'installation de la chaine. Trois massifs d'ancrage en béton de 1,60 m de côté seront répartis en bordure et au pied du mur de la propriété Ouizille. Des ancres seront scellées dans chacun de ces massifs. Les organeaux de ces ancres seront réunis par une chaine de 35 à 45 mm attachée aussi à l'organeau de l'ancre scellée au mur.
Nouveau prolongement de la cale
Le 12 novembre 1922, le conseil municipal de Plœmeur étudie la pétition présentée par des conseillers municipaux et par le comité d'union républicaine de Larmor. Il demande :
- le prolongement de la cale du Kernével de cinq mètres ;
- la construction à son extrémité de quatre marches facilitant le débarquement à marée basse ;
- une échelle en fer sur le côté nord, à l'endroit le plus élevé de la cale.
Considérant que le port du Kernével prend de jour en jour plus d'importance par suite de la création d'un service régulier journalier qui relie le Kernével à Lorient par vedettes automobiles et aussi par la fréquentation de ce havre par les dundees thoniers, les viviers langoustiers, les sableurs et beaucoup de barques sardinières, le conseil demande que le vœu émis par les pétitionnaires soit pris en considération.
Le 11 avril 1923, l'ingénieur des ponts et chaussées informe le maire de la réalisation du projet dont le coût s'élève à 30 670 F. Le financement serait assuré par l'état, le conseil général et la commune, chacun pour 1/3 soit 10 223,33 F.
Le 9 décembre 1925, messieurs Rousseau et Kermabon du Kernével, conseillers municipaux de la toute jeune commune de Larmor rappellent au maire la demande faite 3 ans plus tôt à la municipalité de Plœmeur et restée sans suite.
Ils attirent l'attention sur la mauvaise situation faite aux pêcheurs, aux habitants de la région et aux voyageurs qui débarquent sur l'unique cale de Kernével, qui leurs poissons, qui leurs marchandises ou leurs personnes ; les uns et les autres laissant dans ce charmant petit coin de votre commune un peu de leur superflu monétaire pour le plus grand bien du commerce local.
Or, pour les uns comme pour les autres, et surtout les jours trop nombreux de certaines basses mers, l'accostage est très difficile faute d'eau et plus exactement faute d'une cale assez longue.
Ils renouvellent les demandes déjà formulées.
Le conseil municipal décide que la pétition sera soumise au préfet pour que le service des ponts et chaussées prépare un projet d'amélioration de la cale.
Le 7 février 1926, le conseil municipal de Larmor-Plage demande que soit étudiée l'amélioration de la cale du Kernével selon les propositions faites en 1922. Les travaux s'élèveraient à 40 000 F, dont le financement serait en partie assuré par une surtaxe de 0,05 F par billet délivré par la vedette de Kernével dont il vote le principe le 2 mai.
Le 28 février 1928, l'ingénieur des travaux publics s'étonne de ce montage financier alors qu'aucun projet d'amélioration n'a officiellement été dévoilé. L'étude actuellement en cours expose deux solutions. Soit avec un prolongement de la largeur totale de la cale primitive (7,60 m), soit avec une largeur réduite à 5 m. Dans les deux cas, l'extrémité de la cale permettrait de gagner 0,40 de tirant d'eau et la pente un peu excessive serait réduite. Un escalier construit à l'extrémité de la cale permettrait de débarquer et d'embarquer aisément à tout état de marée. Un certain nombre d'organeaux d'amarrage complèterait l'ensemble.
Le premier projet est évalué à 138 000 F et le second à 73 000 F. La part de la commune serait des 2/3 soit 92 000 F ou 48 670 F selon la solution.
Le 13 mars 1928, au vu de ce rapport, l'ingénieur des ponts et chaussées fait observer qu'une taxe de 0,05 F par billet ne permettrait de gager qu'un emprunt de 13 500 F sur 30 ans. Cette estimation repose sur le passage 30 643 voyageurs transportés par la société des Vapeurs Port-Louisiens en 1927. Il lui parait excessif de contracter un emprunt d'une durée aussi longue pour une amélioration aussi peu importante. Quant à taxer les bateaux de pêche, il y en a moins d'un par jour à débarquer à la cale du Kernével.
En tout état de cause, c'est à la commune de décider du projet qu'elle souhaite retenir et de sa façon de la financer sachant que la part de l'état ne saurait être supérieure à ¼.
Le 1er avril, le conseil municipal arrête son choix sur la seconde solution avec une largeur de 5 m de largeur pour un cout total de 73 000 F dont 54 750 à la charge de la commune. Il décide de solliciter le conseil général, les compagnies de navigation et la commune de Plœmeur dont les langoustiers de Lomener et de Kerroch viennent fréquemment trouver refuge au Kernével.
Le 29 septembre 1932, l'administration établit un nouveau projet proposant un allongement de la cale de 7 m avec une largeur de 5 m et une diminution de sa pente. Le coût est estimé à 85 000 F dont 63 750 à la charge de la commune. Le nombre de voyageurs embarqués et débarqués au Kernével a considérablement augmenté, environ 70 000. La commune envisage une taxe de 0,10 F par passager.
Le 31 janvier 1933, le ministère des travaux publics prend en considération l'avant-projet et demande de le soumettre à la commission nautique.
Le directeur des Domaines, celui du Génie à Nantes au nom du département de la guerre et celui des travaux maritimes à Lorient au nom du département de la marine donnent leur adhésion à ce projet.
La commission nautique se réunit le 3 juillet. Elle est composée de :
L'administrateur de l'inscription maritime, président ;
Messieurs Kermabon Jean-Marie, patron pêcheur à Larmor ;
Conan René patron sableur ;
Credey Jean, pêcheur ;
Le Tallec Louis, ex patron de vedette.
La commission émet un avis favorable et demande d'étudier la possibilité de créer une voute dans le prolongement de la cale afin d'éviter les ensablements qui se produisent au sud de la cale. Cette modification ne parait pas utile et n'est pas retenue par les ponts et chaussées.
Le 21 juin 1934 est mis un terme au projet définitif dont le coût tenant compte des circonstances économiques actuelles n'est plus que de 55 000 F dont 41 250 à la charge de la commune.
Le 8 août, le ministère valide le projet. Le 26 août, la municipalité de Larmor-Plage vote pour faire face aux annuités d'emprunt nécessaire une taxe à l'embarquement et au débarquement de 0,05 F par personne et de 0,50 F par tonne de marchandise ou de sable.
Une enquête d'utilité publique est ouverte à la mairie du 22 au 31 janvier 1935 concernant l'institution des péages proposés. Aucune observation n'est formulée. Toutefois, la commission d'enquête souhaite que les ouvriers, qui sont au nombre de 12, tenus d'emprunter ce passage pour se rendre à leur travail soient exonérés de cette taxe. La commune adopte cette proposition.
La chambre de commerce donne un avis favorable aux travaux projetés et à l'institution des taxes.
Le 13 novembre 1935, le conseil général vote une subvention de 14 000 F à la commune pour parfaire le financement des travaux de la cale du Kernével.
Mais le compte n'y est pas. Dans un rapport du 27 janvier 1936, l'ingénieur des ponts et chaussées considère qu'il est difficile de connaitre avec précision le trafic actuel de la cale de Kernével qui n'est plus desservie par des compagnies régulières de navigation. Il convient, d'autre part, de se montrer prudent dans la prévision du trafic futur en raison du développement des services automobiles de transport entre Lorient et Larmor-Plage qui concurrencent de plus en plus les transports par voie d'eau.
Le trafic marchandises est d'une évaluation encore plus malaisée. Il concerne presque exclusivement le sable et le galet de mer destiné aux constructions. L'interdiction récente de toute extraction de sable de mer à l'embouchure de la Laïta, jadis très fréquentée par les sableurs de la région lorientaise, ne peut avoir pour effet que de restreindre encore l'activité du trafic du sable de mer à Kernével.
La perception des péages sur les voyageurs sera onéreuse autant qu'incertaine, le trafic étant actuellement assuré uniquement par des passeurs, propriétaires d'une vedette, auxquels la commune devra faire appel pour la perception. Dans ces conditions, il a paru prudent de ne pas compter que le revenu des taxes de péages demandées dépasse sensiblement les charges d'un emprunt de la moitié de la part contributive de la commune.
Dans ces conditions, l'administration estime que les ressources constituées par la commune ne couvrent pas plus de la moitié de sa part (41 250/2) soit 20 625 F. En ajoutant la subvention départementale de 14 000 F, celait fait 34 625 F soit un manque de 6625 F. Pour l'ingénieur en chef, la question de l'amélioration de la cale de Kernével ne pourra recevoir de suite qu'autant que la commune aura justifié de moyens suffisants pour couvrir la contribution à sa charge.
La subvention départementale est réduite à 12 600 F nette par application d'un récent décret. C'est donc 8000 F de plus que la commune doit financer. Le 9 février 1936, le conseil municipal autorise le maire à contracter l'emprunt de cette somme à la Caisse des Dépôts et Consignations.
Le directeur des Douanes à Brest, contacté au sujet de l'institution des taxes de péage, fait remarquer qu'il n'existe aucun service de Douane à Kernével et que le recouvrement de ces taxes incomberait alors au bureau de Keroman.
Il fait remarquer que le transport des passagers est assuré par trois particuliers de Kernével, par l'Union Groisillonne Lorientaise Port-Louisienne dont le siège est à Lorient et par la Société Coopérative des vedettes à Locmiquélic. Le contrôle de la perception de la taxe constituerait pour le receveur des Douanes de Keroman un supplément de travail auquel il lui serait difficile de satisfaire.
Pour ce qui est du péage des marchandises, dont le produit ne s'élèverait qu'à 75 F par an, des difficultés hors de proportion avec les intérêts en cause sont à craindre.
Qu'il s'agisse de l'une ou de l'autre taxe, le contrôle des déclarations devant entrainer des déplacements du receveur incompatibles avec ses obligations actuelles, la solution consisterait à lui adjoindre un auxiliaire dont les émoluments seraient prélevés sur le produit des péages. Or le rendement des taxes à recouvrer ne permet pas de retenir cette solution : je ne puis dès lors, que formuler un avis défavorable à l'adoption du projet envisagé.
Le 6 décembre 1936, en accord avec le receveur des Douanes, la municipalité abandonne la taxe sur les marchandises et pour le péage des passagers elle adopte le mode de recouvrement suivant : par avance, les transporteurs verseraient au receveur le montant du péage correspondant au nombre de tickets achetés. Ceux-ci lui seraient ensuite délivrés par la mairie.
Mais la situation économique a évolué et en février 1937 le coût du projet est passé de 55 000 à 80 000 F dont 60 000 à la charge de la commune. Déduction faite de la subvention du conseil général de 14 000 F, cela fait 46 000 F que la commune décide d'emprunter.
Le 11 août 1937, le ministère observe que la subvention du conseil général sera réduite de 10% par le prélèvement sur les dépenses publiques. Ce n'est donc pas 46 000 F que la commune doit emprunter mais 47 400 F. Ceci étant dit, il fait remarquer que la création du péage ne permet que de gager un emprunt de 20 625 F. La combinaison présentée n'est donc pas équilibrée et il ne sera possible d'en poursuivre l'homologation que si la commune s'engage à couvrir, au moyen de ses ressources propres, par une imposition extraordinaire des centimes additionnels qui seraient nécessaires à cet effet.
Le 12 septembre, la municipalité s'engage à couvrir par une imposition extraordinaire, l'insuffisance pouvant survenir entre l'annuité de l'emprunt à contracter et le produit du péage.
Le 14 mai 1938, le ministère des travaux publics donne enfin son autorisation à la mise en œuvre du projet et soumet la demande de création de péage au ministre du commerce.
Ce n'est qu'un an plus tard, le 28 avril 1939, que le président de la République, Albert Le Brun, signe le décret homologuant le montage financier permettant les travaux d'allongement de la cale de Kernével.
Il aura fallu 17 ans pour que le projet initié en 1922 soit enfin réalisable ! Mais la seconde guerre mondiale met un terme à la mise en œuvre du projet.
Après la guerre, le 12 septembre 1948, le conseil municipal de Larmor demande que soit étudié le projet de remise en état de la cale du Kernével. Le 1er mai 1949, il maintient sa demande antérieure d'élargissement, allongement et exhaussement de la cale et demande que soit confirmée la décision ministérielle du 8 août 1934.
L'étude faite par le service maritime évalue à 2 500 000 F le coût des travaux.
La préfecture souligne que la marine nationale est la principale utilisatrice de la cale pour ses liaisons par vedettes avec l'arsenal, la base sous-marine et Port-Louis. Ne pouvant se désintéresser des travaux d'amélioration à apporter à la cale, elle invite la commune à solliciter le concours financier de la marine.
Elle rappelle qu'il convient également de demander au département le maintien de sa décision de subvention qui de 14 000 F en 1935 est maintenant de 625 000 F.
Mais le 4 octobre 1949, le ministre des travaux public répond qu'il n'y a plus de raison d'accorder de subvention de l'état, attendu que la cale ne présente pratiquement d'intérêt que pour la marine nationale.
Le montant des travaux est évalué à 2 500 000 francs dont les ¾ à la charge de la commune. Le conseil vote le principe de la dépense et sollicite une subvention du conseil général qui est refusée. Considérant l'urgence des travaux, la commune demande un prêt de la totalité de la dépense à la caisse des dépôts et consignations.
En février 1951, la commune sollicite le concours des ponts et chaussées pour l'établissement du projet, la surveillance et le règlement des travaux. Elle s'engage en outre, après exécution de l'ouvrage à en faire remise à l'état et à lui verser ultérieurement les sommes nécessaires à son entretien.
Les travaux sont effectués en 1952, trente ans après la première demande ! Leur montant s'élève finalement à 3 264 742 francs et la commune reçoit une subvention inattendue de 462 260 F.
Port de plaisance
Dans les années quatre-vingt, le port du Kernével se tourne résolument vers la plaisance. Le 2 mai 1988, messieurs Le Drian, député maire de Lorient et Le Coz, maire de Larmor-Plage inaugurent le port de plaisance comportant 450 places. Plusieurs agrandissement successifs font que le port compte maintenant 1000 places à flot sur ponton et 100 places visiteurs.